Liberté de penser

Il y a deux façons principales d’appréhender la vie.

Nous nous soustrayons, seuls, beaucoup de nos libertés.

Nous pouvons en accuser la société, l’éducation, les impondérables, les obligations, le sens des  responsabilités, une kyrielle de « oui mais… ».

Il en va pour chacun de son libre arbitre.

Quand on s’imprègne de la maxime du poème « Invictus »* et qu’on en extrait l’essence, la sève, la lumière émergente d’un cachot et de multiples souffrances, apparaît la plus grande des libertés, que nous sommes seuls et uniques à pouvoir nous accorder.

« Je suis le maître de mon destin,
je suis le capitaine de mon âme .»

Cette liberté, c’est la liberté de penser !

Encore faut-il prendre conscience de ce flot incessant qui coule dans nos têtes, encore faut-il prendre conscience de l’impact de ces remous, de ces gouffres, de ces rapides rugissants, de ces cascades cristallines ou de ces plages apaisées sur nos cellules et sur les cellules de l’univers. Là n’est pas le but de cette réflexion.

Pour celui qui arrive à toucher du doigt cette faculté de prendre du recul par rapport à ses propres pensées et à en décortiquer le contenu, il apparaît deux courants principaux.

La première catégorie convient qu’avant la vie, il y a le néant ; après la vie, nous retournons au néant.

Notre naissance résulte d’une réaction chimique induite par la rencontre fortuite de deux cellules de souche différente.

De même, tel gland planté en terre va pourrir dans un certain laps de temps, alors que tel autre va pousser pour devenir un chêne centenaire : constatation simple du plus pur hasard !
La vie apparue sur terre résulte du même principe : pur hasard !

Les continents se sont séparés, générant dans un même temps une multitude d’ethnies différentes, de cultures différentes, apportant chacune la richesse de ses racines : pur fruit du hasard, ou conséquences du mouvement universel qui génère une conséquence du mouvement universel, qui génère une conséquence du mouv… et ainsi de suite, dans la dynamique du mouvement perpétuel : la première pièce tombée du domino induit un trajet aléatoire…

… ou non !

Apparaît ici la seconde catégorie :
La première pièce tombée du domino entame un parcours extraordinaire : là une poulie est actionnée, là un courant d’eau est libéré, ici une allumette enflamme un gaz permettant à un ballon de s’envoler.

Qui n’a rêvé devant la fraîcheur et l’apparente inutilité de ces trajets pensés par de doux « savants », dont le génie ne se manifestera que quelques minutes, alors qu’il aura fallu des heures de patience, de partage, d’ingéniosité, pour élaborer un parcours de milliers de dominos ?

Cet exemple permet de concrétiser l’appartenance de cette seconde catégorie : « Et si !? »
Et si la vie n’était pas un hasard ? Et si les événements contenaient un but caché ? Et si le chêne avait une raison bien précise de s’être érigé à cet endroit, à cette époque, dans ces circonstances-là et pas d’autres ?!

Et si à le regarder (le chêne), à l’étudier, à le ressentir, nous prenions le recul pour saisir l’invisible : la goutte d’eau tombée du ciel au millimètre près où elle s’engloutira dans la terre jusqu’à la racine, la feuille nouvellement éclose qui captera la cellule d’oxygène ou de gaz carbonique apportant la chlorophylle nécessaire à sa belle couleur verte, la texture granuleuse et rédhibitoire de l’écorce qui dissuadera la vache d’engloutir notre chêne d’un coup de mandibules !

Et si nous cherchions dans nos vies la magie de sa structure, comme nous avons découvert la magie de la structure du trajet de dominos ou de la naissance du chêne !

Et si, plutôt que de se recroqueviller, de se plaindre, de s’appesantir, nous nous épanouissions à la recherche de la Compréhension avec un grand C !?

Si, plutôt que de nous taper aux murs de notre geôle en protégeant nos blessures, nous essayions de parvenir à l’étincelle découverte par William Henley ? un cri sortirait du plus profond de notre être :

Invictus !
Je suis le maître de mon destin
je suis le capitaine de mon âme !

A19_i1

Je suis seul responsable de mes pensées et je reprends à l’instant cette liberté, quels que soient les événements autour de moi !

* Invictus
Dans les ténèbres qui m’enserrent,
Noires comme un puits où l’on se noie,
Je rends grâce aux dieux quels qu’ils soient,
Pour mon âme invincible et fière,

Dans de cruelles circonstances,
Je n’ai ni gémi ni pleuré,
Meurtri par cette existence,
Je suis debout bien que blessé,

En ce lieu de colère et de pleurs,
Se profile l’ombre de la mort,
Et je ne sais ce que me réserve le sort,
Mais je suis et je resterai sans peur,

Aussi étroit soit le chemin,
Nombreux les châtiments infâmes,
Je suis le maître de mon destin,
Je suis le capitaine de mon âme.

William Ernest Henley (1849-1903)

*Invictus : du latin invaincu, dont on ne triomphe pas, invincible.

CC BY-NC 4.0 Cette œuvre est sous Licence Creative Commons Internationale Attribution-Pas d'Utilisation Commerciale 4.0.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *